La Symbolique

Cercles de la Parole Conteuse - Carnet de bord des cercles
La symbolique, le lien entre universel et individuel

Cercles de la Parole Conteuse- Compagnie Conte

Pour ouvrir le partage sur ce terme de Symbole : dès lors que l’on dit que ceci signifie cela et veut dire ça et qu’il faut parler de ça comme ça, cela enclenche des positions soit d’adhésion, de soumission ou de rejet et de rébellion.

À contrario, si le mot appelle l’intuition, l’imagination et ouvre un chemin vers la résonance intime de chacun alors la dynamique du symbole est activée et ouvre des possibles, des paysages, des interprétations multiples qui sont la vérité de chacun à l’instant de son vécu.

Le mot est alors proposé avec sa partie cachée qui ne se révèlera que dans l’écoute intime, spirituelle, de chaque personne qui l’accueille et non dans la seule utilisation matérielle des mots au service d’une utilisation rationnelle.

Le vivre en société donne alors sa place au droit de sentir, ressentir et penser librement dans l’écoute de l’autre sans exigence d’une adhésion à une seule pensée.

Nous faisons le constat d’un grand manque d’expérience de cette dimension dans notre société d’aujourd’hui où souvent le mot est la chose et rien d’autre et où se cherche, avant tout, une prise de pouvoir sur la pensée de l’autre.

Auprès de toutes les participantes des Cercles, adulte comme enfant, l’écoute active dont elles ont fait preuve, leurs demandes réitérées d’entendre encore le même conte, soit conté par nous, soit par une des participantes, ainsi que leur appétence pour de nouveaux contes ont manifesté que cette capacité symbolique était bien présente et agissante. Sinon comment expliquer que des adultes et des enfants, pour prendre les plus grands (10/11ans), se soient passionnés pour un conte de petit coq capable d’avaler l’eau d’un puits puis un essaim d’abeille et de ramener une fortune sans que nous soyons, nous les conteuses huées et sommées de passer à quelque chose de plus sérieux et digne d’intérêt !

L’espace symbolique est fondamentalement le lieu où les êtres humains peuvent se rencontrer et se respecter dans l’expression de leur diversité et dans le partage des ressemblances du fait d’être, tout simplement, des êtres terrestres !

Un autre paramètre important pour que l’intelligence symbolique puisse s’épanouir est de disposer d’un temps que nous appelons non exigeant. Toutes celles qui écoutent n’exigent aucune réussite, aucun résultat, aucune vitesse ou virtuosité d’exécution et celle qui conte peut s’arrêter quand plus rien ne lui vient. Si une exigence advient, elle ne peut venir que de celle qui conte et qui se confronte à cet acte si particulier : « Tant que je ne l’ai pas dit je ne sais pas comment je vais le dire. Quand les mots sortent de ma bouche je les entends pour la première fois. Parfois même, je ne me souviens plus de ce que j’ai dit mais les autres s’en souviennent. Le conte est le même et pourtant je ne l’entends jamais, ni ne le conte deux fois pareil.

Car à chaque résonance symbolique, je me découvre et le conte me découvre. »

Cette pratique dans sa dimension symbolique concoure alors à l’individuation de chacun.

Dans cette pratique des Cercles, il a fallu bien sûr, transmettre que cette écoute sensible était bien la bonne, c’est à dire qu’ici, elle était invitée et qu’elle était naturellement présente en chacun de nous. Sur tous les groupes, des mains ce sont levées dès la première proposition pour se lancer à conter. Pour d’autres, il a fallu réentendre deux ou trois fois et pour d’autres encore, un temps d’apprivoisement a été nécessaire pour s’assurer de la non-exigence et/ou saisir cette proposition inhabituelle.

Nous avons entendu dans certaines versions données par les participantes que leur écoute symbolique leur avait permis de mettre une couleur particulière sur telle ou telle image sans déstructurer la trame ou le motif. Nous avons eu des trouvailles magnifiques qui nous ont fait entendre certains de nos contes comme nous ne les avions jamais entendu tant il est vrai que lorsqu’un conte est vivant, il n’a jamais fini de nous parler !

Dans l’audio, vous entendrez :

- Une version où sur tout le début l’enfant est proche des versions entendues (la nôtre et d’autres), mais sur la fin, il apporte un motif totalement surprenant (Diabou n’Dao va aux Etats-Unis) ; Il l’assume totalement et met en force symboliquement le motif « du mépris du petit » en le développant cette fois-ci entre deux peuples : les américains et les africains.

- Une version dans laquelle l’enfant a transformé les rôles donnés aux personnages. À la base il y a une bonne femme avec son petit cochon, elle l’emmène manger des glands ; quand elle veut qu’il rentre, il refuse ; elle va alors chercher successivement un chien, un bâton… Ici l’enfant positionne la femme et le chien comme étant maman et chien. C’est le chien qui veut rester et la maman qui refuse et c’est le chien qui va faire appel aux éléments. Tout en positionnant une particularité, l’enfant continue de servir avec justesse et jusqu’au bout la symbolique de ce conte.

- Une version où l’enfant entre savoureusement dans le phénomène de répétition (le sel jour après jour) nous permettant ainsi de vivre et ressentir la curiosité, la surprise, l’absurdité, l’incompréhension…tout en gardant une simplicité et une efficacité qu’exige ces structures narratives.

- Une version d’un conte où le coq initial devient un perroquet qui se retrouve avec un jabot, sans, qu’à aucun moment, l’enfant ne s’en retrouve troublé. Il est à fond dans son récit ouvert au tout possible.